La découverte de la transgénèse : les OGM une controverse biochimique

Deuxième partie...

I) Une brève présentation des OGM

Les OGM, Organismes Génétiquement Modifiés sont des organismes animaux ou végétaux qui possèdent un gène n'appertenant pas à leur éspèce. Ils sont produits dans le but d'augmenter les rendements des cultures: pour cela les producteurs vont permettre à une plante de créer son propre insecticide ou vont sélectionner ou détruire certains végétaux (mauvaises herbes...).

1) L'Histoire de la transgénèse et des OGM

L'histoire des OGM est liée à celle de la transgenèse. Ainsi, tout commence en 1944, alors que les scientifiques canadiens Oswald Avery, Colin MacLeod et Maclyn McCarty, physiciens et généticiens, démontrent que l'ADN porte l'information nécessaire à la vie. C'est ensuite en 1953 que le biologiste américain James Watson et l'anglais Francis Crick prouvent que l'ADN a une structure en double hélice. Dans les années 1960, le caractère universel de l'ADN est démontré, ce qui a permis aux scientifiques de supposer qu'un transfert de gènes entre n'importe quelles espèces était possible.

Les premiers OGM apparaissent enfin en 1973 lorsque des scientifiques insèrent un gène d'amphibien dans l'ADN d'une bactérie. Quelques années plus tard, en 1978, des scientifiques arrivent à transférer un gène humain codant l'insuline dans la bactérie Esherichia Coli. Ils observent alors que cette bactérie produit finalement de l'insuline. Ainsi, les scientifiques comprennent comment les bactéries transfèrent leur ADN dans une cellule. Cette technique de fabrication d'insuline est autorisée en 1983 au Canada pour le diabète insulinodépendant. Finalement, c'est en 1990 que le commerce d'OGM apparaît aux États-Unis et au Canada, avec d’abord la chymosine (utilisée pour cailler le lait), puis avec des pommes de terre et des tomates résistantes à certains insectes. En 1996, trois pays commercialisent tous types d'OGM: les États-Unis, le Canada et l'Argentine.

2) Principe de fonctionnement de la transgenèse

Il existe de nombreuses techniques de transgenèse. Cependant, on retrouve un « schéma » qui revient dans chacune d'elles. Il y a le donneur, qui est l'organisme sur lequel on prélève le caractère souhaité ; le receveur, qui est donc celui qui le reçoit ; et le vecteur. Le vecteur est le moyen par lequel le caractère est transféré d'un organisme à l'autre. Chacun de ces éléments diffère d'une opération à l'autre. Selon le donneur et le receveur, le vecteur changera.

Il y a plusieurs façons de produire des OGM dont celle qui fut découverte la première est la transgenèse. Celle-ci se déroule en quatre étapes qui reviennent systématiquement :

1) Tout d'abord l’identification et l'isolation du gène d'intérêt. Celui-ci concerne en général des qualités nutritionnelles ou une résistance de l'individu à certains insectes, maladies ou herbicides… Ce gène d'intérêt peut être présent dans n'importe quel organisme vivant (plantes, animaux ou bactéries) grâce au caractère universel de l'ADN.

2) Le gène est ensuite isolé de l'organisme donneur et il est intégré dans une construction génétique avec un gène marqueur. Cette construction est ensuite multipliée pour qu'il y ai assez d'ADN pour l'introduire dans les cellules que l'on veut modifier.

3) Ensuite, il s'agit d'introduire le gène en question dans une cellule de l'organisme.

→ La transformation biologique est le procédé le plus généralement utilisé. Elle consiste à utiliser la bactérie du sol Agrobacterium qui transforme la génétique d’une plante pour la parasiter. On introduit une construction génétique dans la bactérie que l’on a rendue presque incapable de se multiplier. Agrobactérium est ensuite transféré dans la plante et elle va intégrer son génome sur le sien.

→ La seconde technique s’appelle biolistique. Il s’agit cette fois de transfert direc : un canon à particules envoie à très grande vitesse un gène d’intérêt dans des cellules, sans souci de précision. L’ADN de ce gène est fixé autour de minuscules billes d’or. Elles traversent la paroi et la membrane de la cellule sans pour autant leur infliger de dommages irréparables. Cette technique est utilisée dans la thérapie génique cutanée, elle est plus sure que la précédente car aucune bactérie n’est impliquée.

Une microparticule ou une bille d'or autour de laquelle l'ADN du gène d'intérêt est enroulé.

4) Les cellules transformés sont ensuite sélectionnées. Pour cela, on a introduit préalablement un gène lors de la transgenèse (gène marqueur) résistant à un antibiotique détruisant les cellules. Ainsi, les cellules survivantes sont celles dont la transgenèse a fonctionné. C'est après quelques semaines que des pousses apparaissent (dans le cas d'une plante génétiquement modifié), alors elles sont placées dans un milieu de culture qui permettra aux racines de se développer. Lorsqu'elles sont assez développées, la plante est mise en terre.

Les nouvelles PGM sont ensuite croisées à d'autres plantes de façon à ce que le caractère inséré fonctionne toujours chez les descendantes. Cela permet d'obtenir des variétés commerciales conservant le gène d'intérêt.

schéma des étapes d'une transgénèse

La transgenèse, et par elle les OGM, sont des découvertes scientifiques relativement récentes. Cependant, ce sujet soulève de nombreux débats, et l'utilisation des OGM dans le commerce en est la principale cause. Nous essayerons donc, par la suite, de comprendre ce qu'ils représentent dans notre société.

II) Aujourd’hui, les OGM ; ce que ça représente

De nos jours, les principaux OGM sont le maïs, le colza, le soja et le coton ; 87% des surfaces de cultures génétiquement modifiées se trouvent en Amérique. Les États-Unis, l'Argentine et le Brésil sont les principaux leaders du marché des OGM.

Nous essayerons donc de comprendre ce phénomène en étudiant les animaux génétiquement modifiés, et l'impact qu'ont les OGM.

1) Des Animaux génétiquement modifiés ?

a) La commercialisation des Animaux Génétiquement Modifiés

Deux saumons de 18 mois, l'un est transgénique, l'autre non.

Aujourd'hui, très peu d'animaux génétiquement modifiés sont autorisés dans le commerce. Celui ayant le plus fait parler de lui est sans doute le saumon AquAdvantage®, développé par la société américaine AquaBounty. Il a été approuvé en 2016 au Canada (après avoir été autorisé, puis retiré de la vente aux USA en 2015). Sa modification réside sur deux gènes de croissance (l'un provenant d'un autre saumon, l'autre d'une anguille) : il grandit beaucoup plus vite qu'un saumon « traditionnel ».

On retrouve toutefois quelques rares autres espèces modifiées et autorisées à la vente, telles que les poissons NightPearl (commercialisés à Taïwan) ou GloFish (aux États-Unis), ayant reçu le gène GFP, les rendant fluorescents.

b) L'utilisation des animaux transgéniques dans les laboratoires

Les animaux transgéniques sont aussi utilisés par les laboratoires pharmaceutiques pour produire des molécules spécifiques (la moléculture). Par exemple, l'Atryn est un médicament dont une protéine aux propriétés anticoagulantes (et normalement humaine) a été prélevée dans du lait de chèvres génétiquement modifiées pour la produire. Développée par une firme pharmaceutique américaine (GTC Biotherapeutics), cette nouvelle technique permet de produire bien plus efficacement ce médicament.

2) L'impact des OGM

Les OGM ont divers impacts sur différents milieux, et c'est ce que nous aborderons dans ce paragraphe. Cependant, la pression des lobbies sur les scientifiques et les politiques rend difficile toutes enquêtes et recherches. Ce manque d'information entraîne divers débats et font toute la complexité du sujet. Malgré tout, nous avons pu rencontrer un spécialiste de la question, et trouvé des informations sur l'impact environnemental, sanitaire et économique des organismes génétiquement modifiés.

a) Environnemental

Les OGM ont un impact néfaste sur l'environnement. Les plantes vont commencer à devenir résistantes aux insectes ravageurs par exemple. Certains insectes vont également finir par développer une résistance aux insecticides. Cela va entraîner des problèmes pour les insectes « utiles » tels que les abeilles ou les coccinelles. De plus, des plantes vont devenir résistantes aux herbicides, ce qui va créer un cercle vicieux : il va falloir en utiliser de plus en plus, jusqu'à devenir excessif. Par exemple, au Canada, ce problème se pose avec le colza qui devient de plus en plus résistant.

Des problèmes vont aussi être liés aux animaux, comme les poissons transgéniques qui, s'ils sont relâchés dans la nature, vont créer des déséquilibres dans l'écosystème. Cela peut entraîner une diminution de la biodiversité avec beaucoup de disparition d’espèces et un transfert non contrôlé du gène modifié de ces poissons aux espèces sauvages.

Les cultures transgéniques (résistantes aux insectes) sont une menace pour la biodiversité. Elles sont toxiques pour des organismes qui n'étaient pas ciblés par leurs effets. En effet, une enquête a été faite sur des papillons monarques, et a montré qu'une longue exposition au pollen de maïs BT (un maïs transgénique) modifiait le comportement du papillon monarque, ce qui entraîne une baisse des populations.

Mais elles sont aussi toxiques pour certains insectes bénéfiques à la biodiversité. De plus, l'évaluation des risques liés aux cultures transgéniques ne prend pas en compte les prédateurs se nourrissant de petits animaux, victimes des effets indésirables des OGM. Ainsi certains animaux sont indirectement intoxiqués par les cultures transgéniques, à travers leur alimentation. On peut donc voir que le problème touche toute la biodiversité. Cependant, les études réalisées se bornent à en étudier des aspects parcellaires, sans la prendre en compte dans sa totalité, et beaucoup d'écologistes critiquent cette façon de faire.

b) Sur l'homme

Des risques potentiels existent et ont été identifiés comme étant liés à la consommation d'OGM, même s'il n'y a jamais eu, à ce jour, de longues études pour le prouver. Les allergies alimentaires sont produites par des protéines que l'organisme ne peut supporter, ce qui va le conduire à réagir. Or, ce sont les gènes qui sont à l'origine de la fabrication des protéines. Donc si l'on introduit de nouveaux gênes dans des plantes destinées à être manger, cela va également créer des nouvelles protéines qui pourront potentiellement être mal reçues par l'organisme et, ainsi, potentiellement créer de nouvelles allergies.

Trois rats ayant consommé uniquement du maïs OGM.

Des plantes produisant un insecticide de façon permanente occasionnent des risques d'allergies dus aux protéines codées par les gènes modifiés. De plus, il y a un risque de présence, dans tous les OGM, d'un gène de résistance aux antibiotiques et de possibles problèmes liés à la perturbation du métabolisme (pour les plantes à valeur nutritive modifiée et les animaux transgéniques). De même, ces nouveaux gènes introduits dans les plantes peuvent créer des effets indésirables tels que la synthèse de produits potentiellement toxiques. Cependant, ces effets sont à l'heure actuelle impossible à prévoir.

Les chercheurs mettent, pour un certain nombre de plantes, un gène de résistance aux antibiotiques totalement inutile pour la plante mais qui leur sert de repère lors de la transgenèse. Cependant, certains scientifiques craignent que ce gêne de résistance aux bactéries passe dans un système digestif animal ou humain, ce qui pourrait avoir des conséquences très négatives : certains antibiotiques pourraient devenir inefficaces, alors que cela constitue une des méthodes de traitement les plus performants.

c) Économique

Dans le domaine de l'agriculture, les OGM et la transgenèse sont des outils vraiment utiles. Ils permettent d'obtenir de nouvelles variété de plantes plus résistantes, qui grandissent plus vite et dont le rendement est plus élevé que les plantes « traditionnelles ». Leur résistance, plus particulièrement, est un grand atout : elle permet aux agriculteurs de faire des économies importantes en terme d'antibiotiques, ce qui facilite aussi leur travail.

Cependant, des études ont montré que ces cultures n'ont pas un rendement toujours supérieur à celui qui aurait été produit par une surface aux plants non GM. Le seul atout des OGM tournerait-il en sa défaveur ?

III) Et après? Ce que nous promettent les recherches...

La découverte de CRISPR-Cas9

La transgenèse est une opération compliquée, qui demande beaucoup de temps et d'argent. Par conséquent, les scientifiques cherchent des solutions pour pallier ces problèmes. CRISPR-Cas9 en est une : cette méthode est plus rapide, moins coûteuse, plus simple que beaucoup d'autres, et c'est pourquoi elle est si intéressante.

a) Brève présentation

Des recherches récentes ont permis de découvrir un nouvel outil de modification génétique : Crispr-Cas9, aussi surnommé les «ciseaux génétiques ». Il s'agit d'un système de défense immunitaire bactérien, que les chercheurs ont redécouvert au cours des dizaines d'années qu'ont duré leurs travaux. En effet, Crispr-Cas9 a été découvert en 1987 par des chercheurs japonnais, et deux scientifiques, Jennifer Doudna et Emmanuelle Charpentier, s'inspirent ensuite de cette réaction bactérienne pour créer ce nouvel outil. Elles reçoivent par ailleurs de nombreux prix pour cette invention, qui permet de modifier le génome de n'importe quelle cellule plus rapidement que les méthodes « traditionnelles », et est bien moins coûteuse que celles-ci.

b) Fonctionnement

La protéine Cas9 est utilisée par certaines bactéries contre les virus. Elle s'associe à un brin d'ARN correspondant à celui du virus envahisseur (appelé ARN guide), et peut donc reconnaître le génome viral. Lorsqu'elle trouve sa cible, elle coupe le brin d'ADN, et désactive ainsi le virus. Les systèmes de réparation de l'ADN font ensuite leur travail, et la séquence revient à son état initial.

Les scientifiques utilisent donc cette méthode en donnant à Cas9 le brin d'ARN dont ils veulent supprimer la séquence d'ADN correspondante. De plus, il est possible, en ajoutant une autre séquence d'ADN, de modifier le génome de la cellule.

Les scientifiques font constamment des progrès dans le monde de la génétique, et la méthode CRISPR-Cas9 en est une preuve flagrante. Elle permet d'allier efficacité et économie dans un domaine où il est peu évident de le faire, et c'est ce qui la rend populaire.

En conclusion...

Les OGM et les débats qu'ils déclenchent sont un thème d'actualité. De nombreux partis politiques, organisations, entreprises, laboratoires et autres se disputent à ce sujet : économiquement, dans le monde de l'agriculture, ils peuvent être un atout majeur, mais leurs retombées environnementales sont néfastes, et leurs conséquences sur l'organisme humain sont encore mal connues. Pour juger la transgenèse et ses applications dans le domaine de l'agriculture, tout dépend du point de vue adopté : si l'on considère le développement économique plus important que le développement durable ou la préservation de l'environnement, alors on peut affirmer que les OGM sont une découverte bénéfique à l'Humanité. Cependant, si l'on se penche sur le problème dans sa globalité, on s’aperçoit que les retombées négatives sont plus nombreuses et plus importantes que celles considérées comme positives. Il s'agit sans conteste d'une question plus contrastée et plus compliquée à traiter que celle abordée précédemment, et les débats soulevés par ce sujet en sont la preuve. Nous répondrons donc à notre problématique de cette manière : non. Les OGM ne sont pas incontestablement un bénéfice pour l'Homme et notre société.